Marc a souvent photographié l’eau, l’eau des rivières ou des fleuves plutôt que celle de la mer comme si pour lui l’image de l’eau était celle qu’il avait connue dans la maison de son enfance en Haut Beaujolais, un pays de rivières et de bois et qu’ensuite tout au long de ses voyages, il avait photographié ce qui faisait partie de son paysage intérieur depuis toujours. Parmi ses photos où l’eau est présente, j’ai choisi celle de cette femme qui lave son linge accroupie sur une poutre posée sur un bras de rivière, sans doute un petit affluent du Mékong. Regardant cette photographie on rêve l’eau autant qu’on la voit, on l’imagine chaude, douce, limoneuse, prête à envelopper, à caresser, à porter, à alléger, et le geste de la femme, si gracieux, a la même fluidité, la même lenteur, la même douceur que le courant de l’eau elle même. Pour moi cette photographie est à la fois un portrait de Marc et une image de son amour pour la femme, pour la féminité, pour le sentiment amoureux tel qu’il le voyait, capable de porter, d’envelopper, de transporter, de renaître toujours comme une eau qui coule sans jamais s’épuiser.

Pour un photographe, l’eau a aussi le charme du reflet et l’image projetée sur sa surface lui donne une rime visuelle qui redouble son charme. Et depuis quelque temps maintenant je comprends que l’ombre qui se dessine sur l’eau annonce déjà les ombres du soir qui vont venir assombrir ce coin de rivière mais je vois aussi un peu plus loin à l’arrière-plan, le jeune garçon debout dans sa barque dans une sorte de tourbillon d’eau éclaboussée de lumière. Et l’eau vive, cascadante et chantante comme sa gaîté et sa fraîcheur dessinent aussi pour moi la personnalité de Marc, mélancolique parfois comme une eau obscurcie mais aussi tellement joyeuse et juvénile dans ses passions, ses curiosités, son ardeur.

 

Catherine Chaine
2015